Changer de regard sur la différence : la clé de l’entreprise inclusive
Le 4 avril dernier, le Bureau des congrès proposait à ses adhérents d’explorer la notion d’inclusivité dans l’entreprise. Une matinée ponctuée de témoignages et de retours d’expériences riches d’enseignements.
Comme l’a rappelé en préambule Olivier Le Floch, le Bureau des congrès est engagé dans une démarche ambitieuse de RSE, partagée avec ses adhérents. L’inclusion est l’un des axes prioritaires de travail, avec le gaspillage alimentaire et la stratégie bas-carbone. Grâce aux témoignages d’acteurs de divers horizons, cette matinée invitait les adhérents à faire un pas de côté et changer de regard sur les différences.
Voir en l’autre un être unique
Ce regard qui consiste à voir en l’autre un être unique, avec ses faiblesses mais surtout ses forces, les professionnels de La Khaoua le portent naturellement. L’importance accordée à l’ipséité nous guide au quotidien, commente Jean-Marc Pasquier, son directeur, « il s’agit de considérer que toute personne est unique et distincte d’une autre ». Fondée en 2020 par la Fondation Apprentis d’Auteuil, la structure héberge et accompagne des jeunes adultes d’origine étrangère de 18 à 21 ans. Arrivés seuls en France alors qu’ils étaient encore mineurs, ils ont fui la guerre et la pauvreté. La Khaoua prend ainsi le relai de l’Aide sociale à l’enfance, qui les a pris en charge jusqu’à leur majorité, et les accompagne dans toutes les dimensions de leur insertion : professionnelle, accès au logement, droit au séjour, santé, etc. L’objectif de cet accompagnement de quelques mois : les rendre autonomes pour leur permettre de construire leur vie en France.
Quand les fragilités deviennent des forces
« Pour ces jeunes, le processus d’insertion s’apparente à un véritable parcours du combattant, commente Jean-Marc Pasquier, directeur de La Khaoua. Leur désir d’intégration se confronte en permanence à des difficultés, souvent dues à des facteurs extérieurs qu’ils ne maîtrisent pas. » Ils doivent ainsi composer avec leur histoire d’exil et son cortège de maux, avec l’apprentissage d’une nouvelle langue et de nouveaux codes, mais aussi avec leur statut face au droit au séjour. Mais si ces difficultés sont nombreuses, « à La Khaoua, ce n’est pas ce qu’on voit d’eux » commente Annabelle Marchais, chargée d’insertion, et ce regard est notre premier outil d’accompagnement. Il va permettre au jeune, malgré ses difficultés, de déployer son plein potentiel et de surmonter l’ensemble des freins pour rejoindre son désir d’intégration sur le marché du travail ». Et si ce regard est partagé par l’ensemble du marché du travail, « les possibilités d’insertion s’en trouvent démultipliées ». Et les fragilités se révèlent être des forces, voire des opportunités.
« J’ai envie de m’investir dans chaque projet que je mène. »
Ce n’est pas Fabien Héraud qui réfutera cette thèse, lui qui a fait de son handicap « une force de rebond ». Invalide à 80 % depuis sa naissance, le jeune Nantais a toujours voulu jouer dans la même cour que les autres. « J’ai vite compris que cela allait être dur. J’aurais pu évoluer dans un environnement éducatif adapté mais j’ai préféré m’accrocher et m’adapter à la société ». Le besoin de recourir à une aide humaine pour écrire ne l’a pas empêché de passer son bac, un BTS de communication puis une licence en ressources humaines. Doté d’une farouche détermination, il considère chaque obstacle comme un nouveau défi. Le monde du travail ne lui ayant pas ouvert grand les portes à sa sortie d’études, il crée son activité et enchaine les conférences en entreprise et en milieu scolaire. « J’ai envie de m’investir dans chaque projet que je mène. » C’est aujourd’hui au service de l’entreprise adaptée DSI que Fabien met sa force et sa belle énergie, en tant que référent handicap. « Je veux contribuer à changer les mentalités et à montrer aux entreprises que quand on veut, on peut ».
Je veux contribuer à changer les mentalités et à montrer aux entreprises que quand on veut, on peut
Accueillir la fragilité : un accompagnement nécessaire
Tous les intervenants s’accordent sur ce point : l’accueil d’une personne en situation de handicap ne s’improvise pas, il doit s’accompagner d’aides techniques et organisationnelles. Directeur de DSI Atlantique, Christophe Mairesse est convaincu de l’importance de la sensibilisation : « il faut déconstruire les préjugés. On peut conjuguer inclusion, bienveillance et performance économique et sociale. » DSI Atlantique affiche ainsi d’excellents résultats avec 80 % de ses effectifs en situation de handicap. « Nous portons une attention particulière aux soft skills et aux appétences, davantage qu’aux compétences, et cela nous permet d’écrire de belles histoires. Responsable de business unit chez Alten, Vincent Penot témoigne ainsi du parcours réussi d’une ex-salariée de DSI : accueillie sur un poste d’ingénieur méthode en 2018 malgré un handicap et une absence de diplôme sur le métier, elle est aujourd’hui salariée d’Alten. Avec l’accompagnement de DSI notamment sur l’adaptation de son poste, « elle a fait tomber tous mes préjugés », confie Vincent Penot, qui confirme que l’inclusion est loin d’être incompatible avec l’objectif de rentabilité et de performance.